mercredi 10 septembre 2014

Célébration du 20ème anniversaire du Projet La Route de l'esclave


La Route de l’esclave : Leçons du passé, valeurs pour le futur

©UNESCO/Jean O'Sullivan - Des élèves à l'École associée de l'UNESCO, CES Abomey-Calvi (Bénin), devant la murale du logo du Projet éducatif sur la traite transatlantique.
Pour reprendre les paroles d’Elie Wiesel : « Le bourreau tue toujours deux fois, la deuxième fois par le silence. » Historiquement, les défis mondiaux – tels que le développement, les droits de l’homme, le pluralisme culturel et le dialogue interculturel – ont été caractérisés par une absence totale de reconnaissance et de compréhension de la traite négrière transatlantique. Afin de briser le silence qui entoure la traite négrière, l’UNESCO a lancé le projet La Route de l’esclave, visant à aborder à l’échelle mondiale les moyens de promouvoir le rapprochement des peuples à travers le patrimoine commun issu de cette tragédie. Le 10 septembre, l’UNESCO célèbrera le 20e anniversaire du projet à son Siège à Paris.
« La traite négrière n’appartient pas uniquement qu'au passé : elle fait partie de notre histoire et a façonné le visage de nombreuses sociétés modernes, créant des liens indissolubles entre les peuples et les continents, transformant de manière irréversible le destin des nations, de leur économie, de leur culture, » a affirmé la Directrice générale de l’UNESCO, Irina Bokova.
Le projet a eu un impact significatif depuis son lancement en 1994. Son rôle de leader dans le domaine a permis la reconnaissance officielle de la traite négrière en tant que crime contre l’humanité en 2001. « L’UNESCO a lancé le projet La Route de l’esclave sur proposition d’Haïti et de pays africains. Notre approche est holistique et non-culpabilisante afin de renouer le dialogue. Nous nous devons de comprendre cette tragédie qui a divisé l’humanité ; passer cette réalité historique sous silence est un obstacle à la construction de la paix et à la réconciliation. L’UNESCO a réussi à inscrire la traite négrière dans l’agenda international ainsi qu’à sensibiliser le monde. En plus de la reconnaissance de l’esclavage en tant que crime contre l’humanité, nous avons participé à la proclamation du 23 août en tant que Journée internationale du souvenir de la traite négrière et de son abolition. Nous avons mis en place des Comités nationaux « Route de l’esclave » (Cuba, Haïti, Bénin, Portugal, Mexique, Ghana, etc.) ainsi que des réseaux d’institutions scientifiques (Amérique latine, Caraïbes, monde arabo-musulman, océan Indien, Amériques, Europe, etc.), » a détaillé déclaré Ali Moussa Iye, Chef du projet La Route de l’esclave.
©UNESCO/Michel Ravassard
Au travers de divers programmes culturels et éducatifs, le projet renforce la prise de conscience de l’esclavage et de ses conséquences. Il souligne les contributions des victimes de l’esclavage pour la reconnaissance des droits humains universels. L’UNESCO aide les États membres à encourager la recherche, à enrichir leur propre histoire nationale, ainsi qu’à favoriser le partage de la mémoire au travers d’initiatives UNESCO telles que l’Histoire générale de l’Afrique. 
Entre autres exemples, le projet soutient des formations relatives à l’enseignement de la traite négrière dans les écoles, le développement de matériels éducatifs, la sauvegarde des sites de mémoire et d’archives, et la promotion d’actions interculturelles.
Pour l'UNESCO, la mémoire est un élément essentiel de la lutte contre le racisme. La transmission de l’histoire de la traite négrière contribue à renforcer les fondements de la paix, et approfondit le respect des droits humains. « Le défi du ‘vivre ensemble’ dans nos sociétés multiculturelles implique, d’une part, la reconnaissance de l’histoire et de la mémoire de chacun et, d’autre part, le partage des héritages communs, afin de transcender les tragédies du passé, » a expliqué Moussa Iye.
Marcus Miller, Artiste de l’UNESCO pour la paix et porte-parole du projet La Route de l’esclave, œuvre en relayant ce message à travers sa musique. « L'histoire de l'esclavage témoigne de notre capacité à dépasser cette vicissitude. Elle nous montre que le monde peut s’améliorer. Et que nous pouvons faire plus que simplement survivre – nous pouvons aller de l’avant ! » a proclamé ce grand musicien de jazz.
Le projet La Route de l’esclave souligne le pouvoir de la culture dans la lutte pour la dignité. Il célèbre le génie artistique né de l’interaction entre des personnes de différents continents, au travers d’expressions culturelles qui ont enrichi nos sociétés et démontré la richesse du dialogue interculturel. De nombreux styles musicaux – jazz, blues, soul, R&B, reggae, hip hop, tango, capoeira, et bien d’autres encore – trouvent leurs racines dans la traite négrière. Ces expressions culturelles ainsi qu’un certain nombre de sites historiques étroitement liés à la traite négrière, comme l’Île de Gorée, sont sauvegardés grâce aux programmes de l’UNESCO dans les domaines du patrimoine culturel immatériel et du patrimoine mondial. Pour l’UNESCO, ce patrimoine représente un pont pour l’établissement du dialogue et de la compréhension. 
©UNESCO/Jean O'Sullivan - La Porte du non retour, dédiée aux 1,2 millions d'âmes anonymes déportées comme esclaves à partir de la plage d'Ouidah (Bénin).
« Cette histoire fait partie intégrante de la lutte universelle pour les droits de l’homme et l’égalité. Elle doit être enseignée aux enfants du monde entier comme exemple de lutte pour la paix, leur lutte, » a annoncé la Directrice générale. Cette histoire permet également de nourrir notre réflexion sur les sociétés multiculturelles et multiethniques actuelles. Elle motive les luttes que nous menons aujourd’hui contre les préjugés raciaux et la discrimination, et contre toutes les formes d’esclavage qui touchent encore plus de 20 millions de personnes dans le monde.
Une retransmission en direct des célébrations du 20e anniversaire sera disponible sur www.unesco.org. Grâce au hashtag #slaveroute, le public pourra partager ses impressions avec des intervenants éminents, dont S.E. M. Abdou Diouf, ancien Président du Sénégal ; S.E. M. Joachim Chissano, ancien Président de la République du Mozambique ; Christiane Taubira, Ministre française de la justice ; Michaëlle Jean, Envoyée Spéciale de l'UNESCO pour Haïti ; et Marcus Miller. Des animations musicales traditionnelles, ancrées dans la Route de l’esclave, seront également interprétées par Tazenco Gwo ka ; Anuanga, danseur Maasaï ; Mary Paz, électro-percussion cubaine ; Sefarat’ al Khafaâ, groupe de musique Gnawa ; la troupe de musique brésilienne Afro Samba Project. Ces expressions culturelles prennent toutes racines en Afrique, et font dorénavant partie du patrimoine commun de l’humanité, inscrites dans le cœur de chaque société dans le monde
 entier.

Thérèse Diatta ngoboh


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